BIBLIOGRAPHIE
Vannevar BUSH, Les armes d'aujourd'hui et de demain. L'auteur de ce livre important, qui vient de paraître dans une bonne traduction, a joué un rôle considérable dans la dernière guerre. Quelques Américains l'avaient baptisé "Le général des physiciens". Fils d'un pasteur profondément imprégné de religion, il eut une jeunesse assez mouvementée ; il fit de bonne études scientifiques et entra en 1913 au laboratoire d'essais de General Electric, puis suivit des cours de construction mécanique à l'Université de Harvard et à l'Institut de Technologie. Il dirigea, après la guerre 1914-1918, les études sur les tramsports d'énergie électrique au M. I. T. (Massachusetts Institute of Technology) ; il y devint professeur, président et doyen, mais poursuivit des recherches d'inventeur. Il imagina notamment le fameux cerveau électronique qui devait résoudre de nombreux problèmes de balistique et d'astronomie. En 1939, il fut nommé président de l'Institut Carnegie pour encourager la recherche et la découverte, et, en 1940, le président Roosevelt, créant un comité de savants pour préparer la défense nationale, en offrit la présidence à Vannevar Bush. Celui-ci mobilisa tous les savants du pays, en eut bientôt 6 000 sous ses ordres et, grâce à eux, présida à la création de 200 armées nouvelles destinées à la guerre terrestre, maritime et aérienne. Il fut un de ceux qui contribuèrent la plus efficacement à l'explosion de la première bombe atomique et, somme toute, à la victoire interalliée. Dans sa brillante préface, André Maurois, de l'Académie française, note la tendance essentielle de Vannevar Bush le maintien de la paix, le salut de la démocratie telle qu'elle est conçue aux États-Unis et en Occident.
Il est profondément optimiste et à la question essentielle qui hante les esprits de tant de libres citoyens de France, de Grande-Bretagne, de Hollande et de Belgique : un régime démocratique peut-il se défendre efficacement contre un régime totalitaire, il répond par l'affirmative. Pour lui, l'avenir est moins effrayant que ne le dit la propagande terroriste; un régime démocratique, à condition qu'il soit bien organisé, est plus favorable qu'un régime totalitaire aux progrès de la science. Le destruction de notre monde civilisé est loin d'être fatale; il possible que d'autres guerres surgissent, nuis un conflit nouveau ne mettrait nécessairement pas fin aux progrès de la civilisation, même aux jours de l'atome fissible, même si l'on sait que les maladies seront mobilisées pour conquérir la victoire.
On pourra également resserrer les systèmes défensifs de telle sorte que, sans être absolument impénétrables, ils puissent cependant arrêter le grand flot mortel des attaques aériennes. Si terrible qu'elle soit, la guerre ne détruirait pas sans rémission et la démocratie survivrait. Notre force, selon Vannevar Bush, ne réside pas seulement dans nos avions et dans nos navires de bataille, mais encore dans la force tout entière de notre démocratie politique, économique et morale. Sans pouvoir ni suivre l'auteur dans l'analyse et l'étude de toutes armes du passé et du futur, notons avec quelle franchise et quelle audace intellectuelle il envisage la préparation d'un conflit éventuel. Un des problèmes où il est passé maître et qui le préoccupe le plus justement est celui du planning. Il ne le conçoit que par la collaboration intégrale de tous les hommes de science avec les spécialistes militaires.
Il préconise un système grâce auquel un groupe central de planning militaire prendra la direction et la responsabilité ultime, mais avec la collaboration indispensable des esprits les plus distingués dans tous les domaines : physique, chimie, biologie, mathématique, techniques, médecine, psychologie, statistique, droit, théorie et pratique de l'organisation.
Des progrès scientifiques ont été accomplis dans cette direction depuis la guerre, particulièrement dans le domaine scientifique, mais on n'a pas encore trouvé une base solide et on n'est pas encore allé assez loin. On voit combien la lecture et la méditation d'une pareille œuvre, dûe à l'un des artisans scientifiques les plus efficaces de la victoire américaine et alliée, pourraient être profitables dans un pays comme la France où, bien qu'à une échelle plus modeste, mais peut-être devant une nécessité plus urgente encore, se posent les mêmes problèmes d'organisation et de préparation de la défense nationale.
Vannevar Bush. Les armes d'aujourd'hui et de demain compte-rendu par Delage Edmond dans :
Politique étrangère Année 1951
Science, the endless frontier Livre de Vannevare Bush publier en 1960. Disponible en intégralité sur archive.org